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ARCHBISHOP






Addresses/Speeches


29/5/2006

Address to the Ecumenic Institut of Bossey (in french)

DISCOURS

PRONONCÉ PAR SA BÉATITUDE L’ARCHEVÊQUE CHRISTODOULOS D’ATHÈNES

ET DE TOUTE LA GRÈCE

À L’INSTITUT ŒCUMÉNIQUE DE BOSSEY

Genève, le 29 mai 2006


Monsieur le Secrétaire général Dr Samuel Kobia,
Monsieur le Directeur révérend Ion Sauka
Messieurs les professeurs,
Éminences, Excellences, révérends Pères,
Chers amis de l’Association « Les amis du Château»
Mesdames et Messieurs,

Je me réjouis infiniment d’être aujourd’hui parmi vous. Après une visite très substantielle au siège du Conseil œcuménique des Églises, à Genève, je ne peux que manifester mon enthousiasme pour votre amour à mon égard, l’expression spontanée de vos sentiments et votre généreuse hospitalité. Dans la Salle du Conseil œcuménique, je songeais à la profondeur et à l’ampleur du travail accompli au Conseil depuis tant d’années et m’interrogeais sur la tâche qui attend les jeunes, appelés à prendre la relève de grandes figures théologiques de notre tradition chrétienne contemporaine. Il est, voyez-vous, d’une importance capitale que de jeunes apportent de nouvelles idées aux sources historiques ; les jeunes qui ont cependant besoin d’acquérir de hautes qualifications et de cultiver une saine conscience œcuménique. J’attendais donc anxieusement le moment de venir ici, au Château traditionnel de Bossey, car je voulais connaître de près l’endroit où tant de grands théologiens ont servi, dont le fil conducteur était de présenter objectivement les rapports interchrétiens et d’y situer correctement chacune des différentes confessions chrétiennes. Sans une formation aussi exhaustive que possible sur un objet, il est impossible à quiconque de contribuer dans le domaine où il offre ses services, à plus forte raison lorsqu’il s’agit de l’espace spirituel de l’Église où toute forme d’information et de connaissance doit être accompagnée d’une disposition purement ecclésiale et spirituelle, d’un élan de prière à Dieu dans un esprit d’amour sincère envers tout le monde, sans discriminations de race, de lieu, de langue, de culture, etc.

En éducation, les personnes jouent un rôle catalyseur. Les enseignants, les professeurs, les pères spirituels – personnes douées par Dieu du charisme de communiquer et de diffuser les connaissances – ont la possibilité d’inspirer les jeunes, de créer une puissante vision qui éclairera leur chemin. Pour créer une vision, il faut que quelqu’un transmette l’énergie à cet effet : un visionnaire qui parvient à sensibiliser les autres, car lui-même croit à ce qu’il exprime. Autrement dit, dans notre langage ecclésiastique, celui qui vit et qui enseigne par son travail, ses erreurs, son repentir, son pur amour chrétien. Tel a été feu le professeur Nicolas Nissiotis, d’éternelle mémoire. Vingt ans après sa mort tragique, survenue en août 1986, dans un accident de voiture sur la route nationale Athènes-Corinthe, son nom est encore évoqué dans les couloirs de cet Institut ou, plutôt, chaque pierre de cet édifice porte l’empreinte de son passage. En souvenir de lui, je voudrais partager avec vous quelques réflexions, certaines de mes préoccupations et envisager dans quelle mesure la vision de cet homme se poursuit et de quelle manière. Nombreux parmi vous connaissent le travail et le service polyvalent du professeur Nissiotis. Personnalité sortant des chemins battus, visionnaire, idéaliste, titulaire de plusieurs diplômes, fin connaisseur de trois langues étrangères, plein d’amour pour la science théologique, pionnier dans l’établissement du cours de « sociologie de la religion », épris d’athlétisme auquel il a grandement contribué, et de nombreuses autres composantes forment la trame de cette remarquable et complexe personnalité. La richesse de son œuvre d’écrivain assure la pérennité de sa mémoire. Elle constitue une source d’informations sur les principes traditionnels et fondamentaux de la foi chrétienne présentés cependant de façon jeune et vive. Cette présentation est fondée, d’une part, sur la science, d’autre part, sur la rigoureuse approche spirituelle et vécue des valeurs de notre tradition chrétienne.

Toutefois, le point sur lequel je voudrais m’arrêter et analyser plus en détail est la vision de Nicolas Nissiotis sur l’éducation œcuménique et la formation de jeunes et de cadres de toute Église territoriale. Au cours de la 9ème assemblée générale du COE, réunie à Porto Alegre au Brésil, nous avons écouté le cri d’angoisse de plusieurs jeunes délégués pour leur participation plus engagée dans le Mouvement œcuménique, notamment dans la procédure de prise de décisions, car, comme eux-mêmes l’ont dit, un besoin essentiel de renouveler radicalement les structures du Conseil et pourquoi pas de créer une nouvelle vision dynamique se fait jour. Se pose alors la question suivante : les Églises-membres du COE seraient-elles plus inspirées par l’institution d’une nouvelle vision, et dans l’affirmative, quelle serait la plus appropriée ? Autrement dit, les formes traditionnelles de fonctionnement du Conseil sont-elles impuissantes à servir le troisième millénaire de l’humanité ? La réponse à toutes ces questions est assez simple. La vision d’unité du corps visible de Jésus Christ est déjà formulée par le Fondateur de l’Église Lui-même dans sa prière sacerdotale, conformément à l’évangéliste Jean : « Que tous soient un », c’est-à-dire devenir tous un avec la foi révélée qui ressort de notre tradition biblique. Nous observons donc ici que la vision existe certainement, mais qu’elle présuppose la volonté, le sacrifice, le renoncement de soi et, enfin, le vrai amour. Dans le culte orthodoxe, dans chaque liturgie eucharistique, l’Église entière prie pour la réalisation de cette vision élevée par la grâce du Saint-Esprit. L’expérience que possède la conscience de l’Église est absolument essentielle. Elle aide le Corps entier à comprendre les nouveaux défis et les quêtes de l’époque méta-moderne. Cultiver aujourd’hui la juste œcuménicité ecclésiale et l’engagement de chaque membre fidèle de l’Église de contribuer à la réalisation de cette vision jouent un rôle déterminant. Feu le professeur Nissiotis a pleinement adopté ce rôle, vouant son existence au service de la formation et de la promotion de ces valeurs à travers l’Institut œcuménique de Bossey. De 1956 à 1974, il a enseigné aux étudiants venus de chaque coin de la terre, la perspective orthodoxe du Mouvement œcuménique, ayant atteint la distinction la plus haute, en qualité de Président de la Commission Foi et Constitution, fonction qu’il a occupée de 1977 à 1982. Il était un ambassadeur de l’idée de participation des Églises orthodoxes au COE. Plus encore, il prônait quelque chose de plus que l’ordinaire : sensibiliser les Églises au processus du Mouvement œcuménique.

En rendant hommage à l’œuvre et à la précieuse contribution de Nicolas Nissiotis, l’Église de Grèce a décidé d’instaurer une bourse annuelle en son nom, permettant à un ecclésiastique ou laïc, homme ou femme, de poursuivre sa formation en matière de Mouvement œcuménique et de relations avec les autres Églises chrétiennes. La connaissance dissipe tout préjugé et toute peur, révélant les aspects positifs d’une idée. Elle cultive l’esprit critique et la prise de position, nécessaires de nos jours, plus que toute autre chose. Personnellement, je m’intéresse beaucoup à la formation de cadres de l’Église de Grèce, car c’est seulement ainsi que le potentiel humain existant dans notre Église apostolique pourra contribuer résolument à la poursuite de la vision de Nicolas Nissiotis et de tant d’autres figures de proue du monde théologique. L’Église de Grèce tend la main aux jeunes de toute Église, offrant sa collaboration et son amour. Elle les invite tous à créer une nouvelle conscience œcuménique pour relever les défis des temps. L’escalade de la violence, la destruction des ressources naturelles, la présence du fondamentalisme islamique, les nouvelles méthodes scientifiques de reproduction humaine et de nombreuses autres questions similaires composent la nouvelle thématique de la coopération interecclésiale. La vision donc existe. Ce sont les circonstances historiques qui changent et qui forment cette nouvelle conception de la société. L’Église ne craint pas le changement, mais la stagnation. Elle est toujours prête à répondre à toute question, à prier pour dissiper tout ce qui assombrit la liberté humaine. L’Église de Grèce veut, peut et elle est toute disposée à contribuer, en collaboration avec tous les membres du COE, à résoudre ensemble ces problèmes.

En vous remerciant encore une fois de votre hospitalité et de ce repas, permettez-moi de faire don à la bibliothèque de l’Institut d’une collection de la Bibliothèque patristique grecque, éditée par notre Église. J’espère contribuer ainsi à l’étude par les étudiants des textes patristiques et, généralement, à leur formation accomplie ici.



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